
Journal de droit
Réformes constitutionnelles
Article publié le 25 septembre 2017 par lexxika_LHK.
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Tags : changement, constitution, constitutionnelle, democratie, hcc, madagascar, malgache, modification, politique, président, réforme.
Le bruit court que l’on souhaite remplacer la Constitution malgache par une nouvelle jeunette. Quand comprendrons-nous que les petites minettes ne sont belles qu’au début ? Quand se posera-t-on enfin pour fonder une famille, des projets et un avenir ?

La Constitution, texte fondamental de la IVe République de Madagascar, partage l’âge vénérable de ma nièce qui croit encore au Père Noël. Car notre Constitution est jeune, très jeune. Promulguée le 11 décembre 2010, celle-ci n’a pas encore 7 ans. Et pourtant, le bruit court que l’on souhaite la remplacer par une nouvelle jeunette.
Quel est donc ce vice qui nous pousse à changer notre texte fondamental comme de chemise ? Les premiers coupables sont bien entendu à regarder parmi ceux qui siègent sur le trône. Astuce typiquement africaine1Poutine à titre d’exemple a eu l’élégance de passer par le Gouvernement avant de reprendre le siège suprême pour rester au pouvoir, peu sont dupes lorsqu’un Président en fin d’exercice décide par scrupules juridiques de corriger les lacunes de la constitution de son pays. Et pourtant nous nous laissons berner. À chaque réforme constitutionnelle, on constate impuissants la victoire du OUI, quand bien même ces réformes n’apportent guère de consistance à la Démocratie malgache.
Tous les 5 ans, on remet en cause une partie de la Constitution qui, étrangement, n’a pas posé problème 5 ans auparavant. S’ensuit le débat qui revient comme une mauvaise grippe : « faut-il la reformer ? ». Et la réponse n’est généralement pas difficile : c’est non. Non, car il s’agissait de réformes de circonstances, hâtives et dont les portées étaient limitées2du moins ces dernières années. Avec mes condisciples au cours de nos années d’études, on lui préférait un autre débat : faut-il encourager les changements de Constitution ?
D’un côté, la Constitution représente la loi fondamentale d’un pays, les grandes lignes directrices où se retrouve la majorité de la population et qui traduisent les convictions communes3les premiers mots de la Constitution actuelle en sont un bon exemple : « Le Peuple Malagasy souverain, Affirmant sa croyance en Andriamanitra Andriananahary ». Les Malgaches clament haut et fort leur croyance au Zanahary, peu importe leurs religions. C’est une conviction commune. C’est l’instrument qui scelle le pacte social malgache. Dans une certaine mesure, on peut également la considérer comme la loi d’où dérivent les autres lois. Fort de cette aura, elle doit inciter au respect de tout un chacun. Autrement, si elle était ouvertement bafouée, c’est le respect des citoyens pour la loi et pour le pacte social, soit l’autorité de l’État, qui sont mis en cause.
Que chaque dirigeant se permette de modifier la Constitution sous les yeux déjà suspicieux de la population relève d’une démonstration publique de mépris. C’est clairement afficher son assurance que le OUI va l’emporter au référendum malgré la défiance collective. Et malheureusement, le peuple a toujours voté OUI.
Chaque réforme constitutionnelle affaiblit le respect des Malgaches dans l’État et accroit la méfiance générale envers l’autorité publique. In fine, elle rajoute à l’anarchisme ambiant. Ce n’est pas servir les intérêts de l’État que de décider à la légère d’une telle initiative ; et ça n’aide certainement pas à gouverner plus facilement la population dans le long terme.
De l’autre côté, les Constitutions malgaches – pour ce que l’histoire nous apprend – n’ont jamais été adaptées à la population malgache. Celle-ci n’a jamais eu l’occasion de choisir la façon dont elle voulait être gouvernée. À chaque République, elle a toujours cru aux promesses du meilleur orateur4et philanthrope de t-shirts sans qu’on lui ait donné les armes pour saisir le contrat dans lequel elle s’engageait. En conséquence, elle acceptait toujours trop rapidement les offres qui venaient à elle.
Et cette attitude a commencé dès la Première République qui a été chapeautée par la France. Les premiers mots prononcés à la naissance de la République de Madagascar sont d’ailleurs :
« Messieurs, en vertu des pouvoirs donnés à notre Congrès par l’article 76 de la Constitution française et l’article premier de l’ordonnance du Général de Gaulle, j’ai l’honneur de proclamer que Madagascar est un État et que cet État est une République dans la Communauté5Française prévue par la Constitution du 4 octobre 1958. »
Proclamation du Président Zafimahova,
Président du Congrès des assemblées provinciales,
le 14 octobre 1958.
Comme les Malgaches n’ont jamais tout à fait eu le choix, il convient de le leur donner. Que nous choisissons, compte tenu de nos idées, de nos valeurs et de notre malgachéité6pour reprendre la Constitution, la manière dont notre pays et notre population doivent être dirigés! Pour ce faire, un travail important de fond doit être initié. Que chacun s’interroge sur ses convictions profondes, ce qu’il est prêt à sacrifier de droit personnel au profit de l’État, et ce qu’il veut se réserver comme liberté.  C’est dans ces conditions seulement que l’État malgache pourra trouver sa légitimité parmi tous.
Le défaut des changements constitutionnels de ces dernières années, c’est qu’ils n’ont jamais eu de panache. Les projets n’allaient pas suffisamment loin pour s’entourer de l’autorité d’une véritable réforme. Il s’agissait souvent de modification de convenance, afin de faciliter la gestion d’un Président de plus en plus puissant. Leur échec était inévitable, et la dépréciation de l’autorité de l’État d’autant plus grave.
Pour donner une chance à la République malgache, il est temps de se poser des questions sur nos convictions et notre aspiration commune, en d’autres termes : notre idéologie. Il faut débattre et débattre longuement. À terme, la Constitution devra être réformée une énième fois, mais en attendant, il n’y a guère de raison de solliciter inutilement la population.
Notes [ + ]
1. | ↥ | Poutine à titre d’exemple a eu l’élégance de passer par le Gouvernement avant de reprendre le siège suprême |
2. | ↥ | du moins ces dernières années |
3. | ↥ | les premiers mots de la Constitution actuelle en sont un bon exemple : « Le Peuple Malagasy souverain, Affirmant sa croyance en Andriamanitra Andriananahary ». Les Malgaches clament haut et fort leur croyance au Zanahary, peu importe leurs religions. C’est une conviction commune |
4. | ↥ | et philanthrope de t-shirts |
5. | ↥ | Française |
6. | ↥ | pour reprendre la Constitution |
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